Espace famille

L’interview du Gérant

Pourquoi avoir choisi de travailler dans les pompes funèbres ?

— Pour moi, ce métier est une véritable mission de vie. C’est trouver sa place dans la société, se rendre utile. Quand on dit qu’on travaille dans les pompes funèbres, les réactions sont souvent : « Oh, ça doit être très triste ! » Mais en réalité, nous ne travaillons pas avec les défunts, nous travaillons avec les vivants. Nous aidons les familles à traverser un moment de vie d’une extrême intensité.

Il s’agit d’entrer dans leur intimité avec justesse : être discret pour ne pas prendre trop de place, mais suffisamment présent pour qu’elles sachent qu’elles peuvent compter sur nous, qu’elles n’ont pas à tout porter seules. Dans les avis que nous recevons, ce qui revient le plus souvent, ce sont les mots humanité, accompagnement, écoute. Et c’est exactement ce que je cherche à incarner : être utile, être humain et redonner de l’humanité, surtout dans les moments où les familles en ont le plus besoin.

Quelle est votre vision d’un « bon » service funéraire aujourd’hui ?

— Pour moi, un service funéraire doit allier tradition et modernité. Garder une certaine élégance héritée du passé, mais sans tomber dans des modèles standardisés. Je pense notamment aux cérémonies : elles ne devraient pas être des copier-coller avec toujours les mêmes textes. J’essaie de personnaliser chaque cérémonie, par exemple en lisant parfois « Les Deux Bonnes Années » de Jacques Brel. Ce n’est pas un texte funéraire classique, mais il apporte de l’espoir, et c’est ce qui compte.

La modernité, c’est aussi offrir des outils pratiques : un site internet clair, la possibilité de faire ses démarches administratives ou de commander des fleurs en ligne. Et surtout, c’est proposer des rendez-vous à domicile. Beaucoup de familles n’ont ni l’envie ni la possibilité de pousser la porte d’une agence funéraire. Grâce aux signatures électroniques, tout peut se faire chez elles, dans un cadre rassurant.

Vous mettez en avant trois valeurs clés dans votre logo : respect, dévouement, dignité. Pouvez-vous nous en dire plus ?

— Le respect d’abord, car tout le monde le mérite. Peu importe les moyens financiers ou la situation, chaque défunt et chaque famille a droit à la même attention. Cela passe par le respect des volontés, des choix, des croyances, mais aussi des silences. Certaines familles n’ont pas envie de parler, d’autres ont besoin d’être longuement écoutées : nous devons nous adapter.

Le dévouement, c’est la disponibilité totale. Les familles n’ont qu’un seul numéro, et un seul interlocuteur : moi. Du premier rendez-vous au moment de la cérémonie, en passant par les démarches administratives et le portage du cercueil, je suis présent à chaque étape. Les familles trouvent cela très rassurant.

Enfin, la dignité. C’est une exigence constante de notre métier : agir avec sérieux, respect et humanité, quelle que soit la situation

Vous développez aussi une activité spécifique autour des personnes sous protection judiciaire. Pourquoi cet engagement ?

— C’est un aspect auquel je tiens beaucoup. Dans le Nord–Pas-de-Calais, on compte entre 10 000 et 15 000 personnes sous mesure de protection judiciaire. Ce sont des personnes parfois isolées, parfois oubliées. Mon rôle est de leur redonner une voix, de leur permettre d’avoir des obsèques décentes.

Travailler avec ce public, c’est aussi un vrai travail social et humain : on rencontre des personnes très différentes — un ancien SDF, une personne handicapée, une personne âgée — et il faut savoir s’adapter à chacun. C’est de la psychologie, de la sociologie presque. Cela donne du sens à mon métier et le rend très varié.

Et demain, quelles sont vos ambitions ?

— Avant tout, continuer à développer mes services ici, sur mon territoire. Il reste beaucoup de familles qui ne savent pas que nous existons et qui auraient besoin de nous. Je ne cherche pas à aller à Lyon ou Marseille ; mon objectif est d’abord de répondre aux besoins locaux. Ici, dans une région parfois marquée par des difficultés sociales, il y a une vraie nécessité à être présent, utile et accessible.

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